Mémo : Le sorgho grain

Graines de sorgho – ©bbtreesubmission_123RF

1 : Description et origine 

Le sorgho est assez peu connu en Europe bien que ce soit la 5ème céréale la plus cultivée dans le monde, avec plus de 40 millions d’hectares.

On distingue le sorgho grain du sorgho fourrager, principalement utilisé en alimentation animale. Le débouché alimentation humaine représente 40 à 45% de la production de sorgho grain, principalement en Afrique et en Asie, où il est consommé en grain entier, semoule et farine, après transformation sous forme de sucre, ou malté et fermenté sous forme d’alcools (bière, spiritueux…).

Origine botanique : Le sorgho grain est une plante annuelle autogame dite en « C4 », ce qui lui confère la particularité d’avoir un bon rendement photosynthétique d’où une meilleure efficience en conditions chaudes et sèches.

Description : Famille des Poacées (anciennement appelées graminées), genre Sorghum, principales espèces Sorghum bicolor (ou sorgho commun) ou Sorghum halepense (sorgho d’Alep, espèce sauvage).

Pays d’origine : Afrique de l’Est (Soudan, Éthiopie). Principaux producteurs actuels en Europe : Russie, Ukraine, France et Italie.

En France, le sorgho est produit aujourd’hui sur 3 zones géographiques : le Sud-Ouest (bassin historique), la vallée du Rhône et plus récemment la vallée de la Loire. L’extension de l’aire géographique s’est faite grâce à la sélection de variétés plus précoces nécessitant une somme de température plus faible sur le cycle végétatif de la plante.

  • Environ 60 000 ha de surfaces cultivées en 2018, dont 3% des surfaces en agriculture biologique
  • Plus gros pays producteur d’Europe (326 000 tonnes)

Autres noms connus : Grand mil, blé égyptien

Composition nutritionnelle du grain

  • 8-16 % de protéines en matière sèche, avec une déficience en lysine (acide aminé essentiel)
  • 3-4 % de lipides (80 % dans le germe), acides gras insaturés
  • 1,5-3 % de matières minérales concentrées dans péricarpe, couche à aleurone et germe (phosphore, potassium)
  • Vitamines du groupe B dans le germe et la couche à aleurone, Vitamine E et K dans le germe
  • 65-75 % amidon
  • 2-4 % de fibres (hémicellulose)
  • 2-3 % de sucres solubles : saccharose, glucose, fructose

Caractéristiques organoleptiques du grain : 

Apparence : Le grain de sorgho est plutôt rond et petit (1 à 1,4 mm) avec un germe très enchâssé. Le poids moyen de mille grains (PMG) est de 20-35g, contre 350 g pour le maïs. Les grains sont vêtus comme l’avoine et le riz.

La structure du grain est identique à toutes les céréales : enveloppes externes, germes, albumen. Le péricarpe ou son est constitué de 3 couches. La première est recouverte de cire qui peut contenir des pigments.

Il existe une diversité de couleurs et tailles de grain selon les variétés. Le grain blanc est plus utilisé en alimentation humaine car il colore moins la farine, contrairement au grain brun ou rouge.

Goût : L’apport gustatif du sorgho sur des applications alimentaires est peu caractérisé. La farine a un goût légèrement sucré

2 : Obtention 

Cycle de culture : Semis fin avril / début mai – récolte mi-septembre / mi-octobre.

La récolte du sorgho ne nécessite aucun équipement spécial par rapport à une moissonneuse-batteuse équipée pour la récolte des céréales à paille. La maturité physiologique du grain est à 30% d’humidité mais la graine doit être conservée en dessous de 15% d’humidité pour ne pas altérer sa qualité.

La mouture doit s’adapter à la morphologie des grains. Le grain de sorgho est presque rond mais parfois pas assez pour être abrasé. De plus, le germe est important et enchâssé, ce qui peut pénaliser l’abrasion. La méthode artisanale du trempage permet d’humidifier le grain pour rendre le péricarpe élastique et gonflé. L’utilisation du pilon permet d’éliminer ensemble le germe et le son. A l’échelle industrielle, les décortiqueuses abrasives à sec laissent une partie du germe ce qui donne une farine de meilleure densité nutritionnelle mais avec un risque plus élevé de rancissement.

3 : Réglementation

Statut : Denrée alimentaire courante

Déclaration : Sorgho, farine de sorgho… 

Certification bio : Oui

Allergènes selon le Règlement (UE) N°1169/2011 : Aucun, céréales naturellement sans gluten 

Allégations : Source de / riche en protéines, source de / riche en fibres, source de fer, phosphore, potassium, vitamine B1 et B3

A noter : Les allégations nutritionnelles doivent être validées en fonction de la teneur en nutriments des produits qui varient selon les variétés de sorgho grain et les procédés de transformation appliqués.

4 : Intérêt fonctionnel

Domaines d’applications : Nouveau en Europe mais traditionnel en Asie et en Afrique, le sorgho est une graine qui se cuisine comme le riz ou le quinoa.

Transformations possibles :

  • Pains et galettes
  • Couscous de sorgho
  • Pâtes
  • Jus de sorgho
  • Pop sorgho
  • Biscuits
  • Extrudés
  • Farines infantiles
  • Boissons alcoolisées (Bière ou Baijiu chinois)
  • Desserts végétaux à base de sorgho…

Depuis 2015, la Société Agricultura Biologica produit par exemple des pâtes au sorgho riche en fibres, fer, vitamines B1 et B3 sous la marque Nutracentis.

Fonctionnalités : Le sorgho est une céréale qui, naturellement, ne contient pas de gluten. La farine ou les protéines de sorgho représentent de bons candidats potentiels pour le développement de pains et autres produits céréaliers destinés aux personnes intolérantes ou sensibles au gluten.

Les facteurs environnementaux et génétiques influencent la composition des grains et par conséquent leurs propriétés rhéologiques et texturantes. Par exemple, les grains à faible teneur en amylose produisent des pâtes plus collantes. Par ailleurs, les grains peuvent être plus ou moins vitreux ou farineux selon les variétés. En Afrique la variabilité peut être 100% vitreux ou 100% farineux. Les sorghos français ont une vitrosité intermédiaire : vitreux à l’extérieur, farineux à l’intérieur. Les semenciers travaillent pour obtenir des variétés dites vitreuses (>80%) et à l’inverse d’autres dites farineuses (peu vitreuses).

En termes de fonctionnalité, les grains vitreux donneront plutôt des semoules après mouture et sont propices au « popping ».

5 : Intérêt nutritionnel et bénéfices santé connus

Le grain de sorgho est essentiellement composé d’amidon dont la digestion serait plus lente que celle d’autres céréales.

Sa teneur élevée en protéines (11% en moyenne dont les kafirines, protéines de réserve de type prolamines) revêt un intérêt particulier pour les personnes qui excluent ou diminuent leur consommation de protéines animales. En revanche, les protéines du sorgho ont une faible digestibilité d’une part par la présence de complexes avec les antioxydants du grain mais également du fait de leur structure propre, assemblée en corps protéiques. La fermentation ou l’extrusion permet cependant d’améliorer leur digestibilité. L’association avec d’autres sources de protéines telles que les légumineuses contribue également à pallier la déficience en lysine qui caractérise le sorgho, tout comme la plupart des autres céréales ou assimilées.

En outre, la plupart des variétés de sorgho sont sources de fibres, vitamines, minéraux et contiennent pour certaines diverses molécules à forte valeur ajoutée pour l’agro-industrie dont des composés phénoliques (Ex : tanins), des anthocyanes. Des études menées in vitro ou chez l’animal montrent notamment une interaction bénéfique entre ces composés bioactifs et le microbiote intestinal[1]Ces composés isolés pourraient également jouer un rôle bénéfique sur des paramètres liés à l’obésité, au stress oxydatif, à l’inflammation, au diabète ou à l’hypertension[2].

Aujourd’hui, toutes les variétés enregistrées en Europe (UE) ont un taux de tanins inférieur à 0,3%, on peut donc considérer toutes les variétés sans tanins. Ce critère de taux de tanin inférieur à 0,3% est obligatoire pour inscrire une variété au catalogue européen.

Les nombreux projets de recherche en cours permettront sans doute de potentialiser la valeur nutritionnelle et fonctionnelle du sorgho dans les années à venir (Thèse INRA-CIRAD en cours / Projet IRSTEA proposé à l’ANR 2019).

6 : L’offre bio

La part de sorgho grain en Bio est très marginale bien qu’il n’y ait pas de freins particuliers à sa culture car c’est une plante rustique, sans maladie majeure. En France, environ 3% des surfaces seraient cultivées en Bio soit 1800 ha en théorie.

Le sorgho est idéal pour préparer l’économie circulaire : les racines améliorent le sol et ont un intérêt en rotation des cultures, les feuilles peuvent être ensilées pour l’alimentation animale, les grains sont adaptés à l’alimentation humaine. Il semble en revanche nécessaire d’identifier et structurer les débouchés.

Le sorgho Bio est commercialisé en magasins spécialisés sous forme de grains à cuisiner, de farine ou boissons. On le trouve en grains ou en farine chez plusieurs fournisseurs d’ingrédients biologiques européens, et notamment certaines coopératives françaises.

Où trouver le sorgho ?

[1] Martínez, I. et al (2009). Diet-induced metabolic improvements in a hamster model of hypercholesterolemia are strongly linked to alterations of the gut microbiota. Applied and environmental microbiology 75:4175-4184.

[2] de Morais Cardoso et al. Sorghum (Sorghum bicolor L.): Nutrients, bioactive compounds, and potential impact on human health. Crit Rev Food Sci Nutr. 2017 Jan 22;57(2):372-390. Review.

Autres sources

– Journée de réflexion « Le sorgho en alimentation humaine » organisée par Céréales Vallée / Sorghum ID le 17 janvier 2019 à Paris

sorghum-id.com

-https://www.arvalis-infos.fr/sorgho-telechargez-toutes-les-preconisations-pour-la-campagne-2019-@/view-17912-arvarticle.html

-https://www.cirad.fr/nos-recherches/filieres-tropicales/sorgho/contexte-et-enjeux

Les FODMAPs : éclairage scientifique et évolution du marché

      Exemples de régime pauvre en FODMAPs – ©bond 123RF

Après le lactose et le gluten, les « FODMAPs » sont aujourd’hui identifiés comme de nouveaux responsables potentiels des troubles digestifs qui perturbent le quotidien de consommateurs de plus en plus nombreux. Bien que le régime sans FODMAPs reste encore confidentiel pour le grand public, il présenterait un intérêt démontré scientifiquement dans le cadre de la prise en charge du Syndrome de l’Intestin Irritable. Des produits « sans FODMAPs » ou « À faible teneur en FODMAPs » commencent également à émerger sur le marché. Valorisation médiatique vs. réelle pertinence de cette pratique / ces produits ? Notre dossier spécial vous propose une mise au point concernant le niveau de connaissances scientifiques dans le domaine des FODMAPs…

 1 : Qui sont les FODMAPs ? Portrait de famille

FODMAP est l’acronyme anglo-saxon pour Fermentable Oligosaccharides, Disaccharides, Monosaccharides And Polyols. Cette famille regroupe des hydrates de carbone à chaîne plutôt courte, peu ou non absorbés au niveau intestinal et fermentescibles.

F – Fermentable (fermentescible en français) = Capacité des glucides non digérés par l’Homme à être fermentés par les bactéries intestinales.

O – Oligosaccharides (oligosides) = Glucides présentant un degré de polymérisation – soit le nombre d’oses de la molécule – compris entre 3 et 9 (DP3-9). Ce groupe comprend notamment les fructanes, dont l’inuline et autres fructo-oligosides ou FOS, présents par exemple dans les artichauts, l’ail, l’oignon, le topinambour, le blé ou le seigle ; et des galactanes, avec, en particulier, les alpha-galactosides ou GOS présents dans la plupart des légumes secs (haricots, pois chiche, lentilles…).

D – Disaccharides (diosides) = Glucides composés de deux oses. Le principal dioside concerné est le lactose (galactose + glucose), sucre naturellement présent dans le lait, en cause chez les sujets ne présentant qu’une faible activité lactasique et/ou qui sont « intolérants au lactose ».

M – Monosaccharides (oses) = Le principal ose concerné est le fructose qui peut être ingéré en tant que « sucre ajouté » ou naturellement présent, en quantité supérieure au glucose, dans des fruits (poire, pomme) ou dans le miel.

A – And

P – Polyols (sucres-alcool) = glucides naturellement présents dans des fruits et légumes ou obtenus par synthèse chimique ou par voie fermentaire. Principalement utilisés comme additifs pour leurs propriétés édulcorantes (Exemple : xylitol ou E967) ou stabilisantes (maltitol ou E965, sorbitol ou E420), les polyols présentent une teneur réduite en calories avec un pouvoir sucrant inférieur à celui du saccharose.

Principales sources alimentaires de FODMAPs :

Source : d’après présentation de Corinne Bouteloup lors du CIAG 2016 : Allergies, intolérance et hypersensibilités alimentaires.

Le terme FODMAP n’est apparu que dans les années 2000 dans la littérature scientifique[1] et les médias. Des recommandations spécifiques à chacun de ces glucides existaient précédemment mais le terme FODMAP a été proposé pour regrouper tous ces composants sous une unique bannière. Leur présence au sein de notre alimentation est donc bien plus ancienne puisqu’ils sont naturellement présents dans de nombreuses céréales (avec ou sans gluten), les protéagineux, les produits laitiers et les fruits et les légumes. Dans le cas des céréales, les FODMAPs sont situés principalement dans l’amande des graines. Leur concentration dépend de la céréale. Par exemple, la teneur est plus faible dans l’épeautre que dans le blé panifiable[2].

2 : Balance entre les bénéfices et les effets indésirables liés au FODMAPs

La consommation de FODMAPs serait en augmentation dans le cadre de l’alimentation occidentale actuelle du fait de leur ajout, en tant qu’ingrédient dans les produits transformés. Certains d’entre eux sont en effet utilisés en tant qu’ingrédients fonctionnels ou additifs pour leurs propriétés technologiques ou nutritionnelles. Par exemple, les fructanes augmentent la durée de conservation et l’inuline, utilisée comme fibre soluble, améliore aussi la stabilité des mousses et des émulsions. Le sorbitol est utilisé comme excipient pour ses propriétés humectantes et stabilisantes.

Les aliments riches en FODMAPs, en particulier ceux contenant des fructanes (FOS) et/ou des galacto-oligosides (GOS), sont associés à des propriétés prébiotiques*. Un ingrédient prébiotique favorise la croissance et/ou l’activité fermentaire des bactéries intestinales en leur servant de substrat. Cependant, leur valorisation par le biais d’allégations de santé est encore très restreinte.

D’autres effets positifs sur la minéralisation des dents ou l’impact réduit sur la glycémie postprandiale sont attribués aux polyols et peuvent être revendiqués par le biais d’allégations de santé autorisées au niveau européen (Commission Regulation (EU) 432/2012 of 16/05/2012). Autre exemple, le remplacement à hauteur de 30% de glucose et/ou saccharose par du fructose dans des boissons ou aliments peut également faire l’objet d’une allégation de santé en lien avec l’impact glycémique (Commission Regulation (EU) 536/2013 of 11/06/2013).

3 : Alors ? … Bon ou mauvais les FODMAPs ?

S’ils présentent des effets bénéfiques pour la santé bien démontrés, leur implication dans la survenue de symptômes digestifs (douleurs abdominales, diarrhée, ballonnements, flatulences…) a plus récemment été mise en avant, en particulier chez les patients atteints de Syndrome de l’Intestin Irritable (SII). Le SII est le trouble fonctionnel intestinal le plus fréquent touchant entre 10 et 20% de la population générale[3]. Le syndrome est deux fois plus répandu chez les femmes que chez les hommes et affecte principalement les personnes âgées de 20 à 30 ans. Outre l’interrogatoire alimentaire, le diagnostic repose principalement sur la réalisation de tests respiratoires qui permettent de mesurer les taux d’hydrogène et/ou de méthane dans l’air expiré lors d’une épreuve de charge à certains sucres (lactose, fructose, sorbitol).

Plusieurs essais cliniques ont démontré le rôle des FODMAPs dans l’induction des symptômes caractéristiques du SII, notamment l’inconfort abdominal et le ballonnement, avec un effet négatif beaucoup plus marqué en cas d’association de différents FODMAPs. Un problème d’absorption des FODMAPs peut être dû à une absence ou faible activité enzymatique responsable de leur dégradation ou une faible capacité de leurs transporteurs au niveau de la barrière intestinale. Les FODMAPs mal absorbés provoquent alors, par effet osmotique, un afflux d’eau au niveau de la lumière intestinale alors que leur fermentation rapide est à l’origine de la production de gaz. Ces deux phénomènes concourent à provoquer une distension intestinale responsable d’une sensation de ballonnement, de flatulences, de troubles douloureux de la motricité intestinale.

4 : Innovation : de nouveaux services et produits pour réduire sa consommation de FODMAPs 

Le régime sans ou pauvre en FODMAPs représente aujourd’hui une réponse efficace au SII[4]. Cependant, ce régime très restrictif ne serait être maintenu sur une longue durée, car il engendre par ailleurs des effets potentiellement négatifs (altération du microbiote, risque de déficiences nutritionnelles…) à long terme. Sa mise en place fastidieuse nécessite de plus un accompagnement par un professionnel formé.

Pour faciliter le quotidien des patients, des listes d’aliments sans FODMAPs sont diffusées par des sociétés médicales telles que la Société Nationale Française de Gastro-Entérologie ou font l’objet d’ouvrages mais dont la validité scientifique est plus ou moins contrôlée.

Un label FODMAP Friendly permet dès à présent de certifier des produits présentant un taux inférieur à un certain seuil de FODMAPs. Si on le trouve sur certains produits britanniques[5], ce logo ne semble pas encore avoir fait son apparition sur le marché français,… sachant qu’il ne serait a priori pas autorisé au regard du cadre réglementaire européen. En effet, se pose la question d’une considération de cette illustration au même titre que les autres allégations nutritionnelles qui figurent sur une liste positive restreinte validée par l’EFSA. L’allégation « sans lactose » par exemple ne figure pas dans la liste des allégations nutritionnelles autorisées. L’université australienne Monash a également proposé une certification “Low FODMAP”.

Côté ingrédients, certaines fibres ont profité de cette opportunité pour se différencier des fibres hautement fermentescibles et autres fructanes… Le fournisseur Taiyo a été un des premiers fournisseurs bénéficiant de la certification australienne pour leSunfiber®, une gomme de guar partiellement hydrolysée. Dans le même temps, Nexira obtenait la certification FODMAP friendly pour sa fibre d’acacia  Fibregum™.

                             

Dans ce contexte, le nombre de lancements d’aliments et boissons avec allégation « Low FODMAPs » a malgré tout connu une croissance annuelle de +130% entre 2014 et 2018 (De 100 à 2775 produits indexés selon Innova Market Insights).

Les principales catégories concernées en 2018 sont les sauces et assaisonnements (40% des lancements), suivies par la boulangerie (15%), les produits céréaliers (12%) et les produits laitiers / plats préparés (ex-aequo à 9%).

Le riz représente l’ingrédient à plus forte croissance parmi les produits « Low FODMAPs » (+119% de croissance annuelle moyenne selon Global, CAGR 2014-2018).

Des solutions digitales font également leur apparition à l’instar du tracker de FoodMarble qui permet de détecter, par une analyse de l’air expiré, les FODMAPS à l’origine de l’inconfort digestif. Sur le même principe qu’un alcootest surveille le taux d’alcool, le tracker nommé AIRE, détecte la présence de gaz liés aux aliments fermentés dans l’air expiré. Le principe repose sur le fait que les gaz qui seraient produits suite à la fermentation des FODMAPs traversent la barrière intestinale et se retrouvent dans la circulation sanguine puis atteindre les poumons. L’application permet également de consulter une liste d’aliments à éviter et propose des menus personnalisés aux utilisateurs.

Exemples de produits :

        Monckingbird mélange spécial Trail de Fody (Canada)          

                                                

Sauce Dr Reich’s (Allemagne) lancée à Biofach 2019

 Le nombre de lancements d’aliments et de boissons revendiquant une faible teneur en FODMAPs est en forte augmentation depuis ces 20 dernières années, principalement dans les pays anglo-saxons. Les FODMAPs ne sont pas qu’un sigle à la mode. L’intérêt du régime sans FODMAPs a été clairement démontré chez les sujets atteints du syndrome de l’intestin irritable. En revanche, la pratique d’un régime d’éviction inutile ou mal équilibré peut conduire à des déficits nutritionnels, d’autant plus que certains d’entre eux auraient de potentiels effets bénéfiques sur la santé. La suppression de l’alimentation de tous les aliments contenant des FODMAPs réduirait notamment l’apport en prébiotiques et probablement simultanément en fibres alimentaires.

Le sujet des FODMAPs n’a donc pas fini de nourrir les débats scientifiques. L’apparition de nouveaux produits innovants revendiquant l’absence ou une faible présence de FODMAPs est également attendue en Europe. Reste à savoir comment la valorisation d’allégations nutritionnelles relatives aux FODMAPs évoluera d’un point de vue réglementaire ? Et comment les acteurs du Bio investiront cette tendance…

[1] Gibson & Shepherd. Aliment Pharmacol Ther 2005; 21: 1399–1409.

[2] Synthèse « Les FODMAPS » réalisée par le pôle Céréales Vallée et l’Université Clermont Auvergne

[3] Hookway et al. BMJ 2015;350:h701

[4] Staudacher and Whelan K. Gut 2017;66:1517-1527.

[5] v. le site de e-commerce dédié https://fodmarket.co.uk/

Autres sources :

-Les glucides : les sucres et les autres. Martine Champ. Cholé-Doc 161, Mars-Avril 2018.

-Biesiekierski JR, Rosella O, Rose R et al. Quantification of fructans, galacto-oligosacharides and other short-chain carbohydrates in processed grains and cereals. J Hum Nutr Diet. 2011; 24(2):154-76.

-Gibson PR. History of the low FODMAP diet. J Gastroenterol Hepatol. 2017; 32 Suppl 1:5-7.

-Hill P, Muir JG, Gibson PR. Controversies and Recent Developments of the Low-FODMAP Diet. Gastroenterol Hepatol (N Y). 2017; 13 (1):3 6 – 45.

-Halmos EP, Power VA, Shepherd SJ, Gibson PR, Muir JG, 2014. A diet low in FODMAPs reduces symptoms of irritable bowel syndrome. Gastroenterology 146(1), 67-75.e5.

-Muir JG, Rose R, Rosella O et al. Measurement of short-chain carbo-hydrates in common Australian vegetables and fruits by high-per-formance liquid chromatography (HPLC). J Agric Food Chem. 2009; 57(2):554- 65.

-Shepherd SJ, Halmos E, Glance S, 2014. The role of FODMAPs in irritable bowel syndrome. Curr Opin Clin Nutr Metab Care 17(6),605-609.

-Tuck C and Barrett J. Re-challenging FODMAPs: the low FODMAP diet phase twoJournal of Gastroenterology and Hepatology 2017; 32 (Suppl. 1): 11–15.

Mémo : Le sarrasin

Graines de sarrasin – ©Gerbaud (INRA DIST / flickr.com)

 

1 : Description et origine 

Origine botanique : Le sarrasin est une des plantes les plus anciennement domestiquées par l’humain, en Chine, il y a quelque 4000 – 5000 ans. Il a été introduit dans d’autres pays de l’Asie du Sud, en Europe et en Afrique où le blé noir était très populaire, notamment entre le 17ème et le 19ème siècle. Mais l’intérêt envers cette pseudo-céréale a diminué au cours du 20ème siècle, surtout dans les pays occidentaux, pour laisser place à une plus grande culture du blé[1].

Description : Le Sarrasin, Fagopyrum esculentum, est une pseudo-céréale qui appartient à la famille des Polygonacées[2], qui comprend également l’oseille ou la rhubarbe.

Les caractéristiques agricoles du sarrasin ont participé à l’expansion de sa culture aux quatre coins de la planète. En effet, il peut pousser dans des sols peu fertiles, arides et même à haute altitude, comme c’est le cas au Bhoutan ou au Népal, où le sarrasin pousse à plus de 3000 mètres. La graine de sarrasin est traditionnellement utilisée en nutrition humaine, sous forme de farine par exemple, mais également pour l’alimentation animale.

Dans les meilleures conditions, le sarrasin peut atteindre 70 cm avec un fruit contenant une graine unique triangulaire entourée d’une enveloppe noire (éliminée avant la consommation). C’est d’ailleurs de cette couleur foncée qu’émane la dénomination de blé noir[1]. Il existe plusieurs espèces de blé noir cultivées dans le monde mais il n’y a que deux principales variétés qui sont utilisées pour la consommation alimentaire humaine et animale : le sarrasin commun (Fagopyrum esculentum Moench) et le sarrasin de Tartarie (Fagopyrum tataricum). Le sarrasin de Tartarie serait une variété plus intéressante d’un point de vue nutritionnel que le sarrasin commun[3], mais c’est cette dernière qui est la plus cultivée dans le monde.

Le sarrasin commun (Fagopyrum esculentum Moench) est une plante annuelle herbacée. Sa grande adaptabilité écologique en fait une plante capable de pousser dans des conditions extrêmes. En outre, la culture du sarrasin possède des avantages puisqu’il est cultivé facilement, nécessite une courte durée de croissance (entre 70 et 90 jours) et permet d’être conservé pendant une longue période, sans altérations, grâce aux différentes propriétés antioxydantes de ses composants. Néanmoins, il existe aussi certains inconvénients à la culture du sarrasin, à l’instar d’un faible rendement car les graines mûrissent de façon asynchrone et il y aurait donc plus de soucis techniques liés à la récolte, par rapport à d’autres céréales[1].

Autres noms connus : France : Blé noir, Froment noir, Renouée, Bouquette, Sarrasin commun

Classification : Règne : Plantae ; Division : Magnoliophyta ; Classe : Magnoliopsida ; Ordre : Caryophyllales ; Famille : Polygonaceae ; Genre : Fagopyrum ; Espèces : Fagopyrum esculentum, Fagopyrum tataricium.

Chiffres-clés : Aujourd’hui, la culture de sarrasin dans le monde regagne du terrain, avec un rendement annuel mondial avoisinant les 3 millions de tonnes[4]. En 2018, le rendement en sarrasin total (culture conventionnelle et biologique) s’élevait à 18 8071 tonnes, pour 57 367 hectares plantés. En France, principal pays producteur en Europe, le sarrasin de culture biologique représentait 4% de la production française de céréales Bio, avec près de 20680 ha selon les données Agence Bio de 2019.

Répartition des volumes bio collectés en France en 2017 par espèce – ©France Agrimer

 2 : Réglementation 

Allergène : Le sarrasin ne figure pas dans l’annexe II de la liste des 14 allergènes à déclaration obligatoire d’après le Règlement UE N°1169 / 2011 (ou Règlement INCO), puisqu’il ne contient pas de gluten[13]. Cependant, l’ANSES a été saisie en 2015 afin d’étudier plusieurs allergènes émergents, dont fait partie le sarrasin. Dans l’avis rendu en 2018[14], il est indiqué que 3% des cas d’anaphylaxie alimentaire sévère recensés entre 2002 et 2017 en France dues à des allergènes ne figurant pas dans l’annexe II du règlement 1169/2011 étaient en lien avec des réactions allergiques suite à l’ingestion de blé noir ou des produits en contenant.

Doses maximales : En 2019, l’ANSES a été chargée par la DGCCRF de réétudier les doses maximales autorisées d’alcaloïdes tropaniques (Atropine et scopolamine) contenus dans la farine de sarrasin, suite à plusieurs cas d’intoxications. Pour 1 kg de farine de blé noir, les teneurs de 13,2 µg d’atropine et de 16 µg scopolamine ont été retenues[15].

Allégation : Des allégations nutritionnelles peuvent s’appliquer, aux vues de la composition nutritionnelle du blé noir, parmi lesquelles il est possible de citer : « Source/Riche en fibres », « Faible teneur en sucres » ou encore « Source /riche en protéines ». Ces revendications nutritionnelles sont évidemment envisageables à condition de respecter les teneurs requises par la réglementation.

Par ailleurs, aucune allégation de santé valorisant le sarrasin ou ses dérivés n’est autorisée à ce jour selon le Règlement (CE) n°1924/2006 malgré des résultats scientifiques précédemment cités concernant de potentiels effets bénéfiques en matière d’hypertension artérielle ou de régulation de la glycémie.

3: Intérêts fonctionnels 

Domaines d’applications : Le sarrasin (Plante) est utilisé en nutrition humaine et animale sous différentes formes en fonction des applications : grains entiers, farines, en graines germées ou encore en miel. Dans ce sens, le miel issu des plantes de blé noir représente un produit important lié à la culture de la plante. Un hectare de sarrasin produirait en moyenne 125 kg de miel, voire une quantité avoisinant les 300 kg pour certaines variétés[5].

Puisqu’elle ne contient pas de gluten, la graine de sarrasin n’est pas utilisée dans les aliments subissant les processus de panification. Cependant, on la retrouve assez fréquemment sous forme de farine et de flocons, pour diverses utilisations.

Transformations possibles :

– les galettes, crêpes, pancakes et blinis ;

– le kasha (graines de sarrasin toastées) ;

– les « céréales du petit-déjeuner » de type pétales de sarrasin ;

– les soba (nouilles asiatiques à base de sarrasin)

 

Galette de sarrasin complète – ©Odélices                                                                                                                           

 Pâtes de sarrasin – ©macheesmo

 

Blinis à la farine de sarrasin – ©Panier de saison_Pinterest

4 : Intérêts nutritionnels et bénéfices santé connus 

En comparaison avec d’autres céréales traditionnelles, la graine de blé noir est riche en protéines de haute qualité, puisqu’elle contient une forte teneur en acides aminés essentiels. De plus, le sarrasin, ne contenant pas de gluten, peut être une alternative intéressante au blé pour les Malades Cœliaques.

Intérêts nutritionnels : Les graines de sarrasin renferment une grande variété de macro et micronutriments, dont des protéines, des polysaccharides, des fibres alimentaires mais aussi des vitamines et minéraux et autres actifs d’intérêt dont des composés phénoliques tels que la rutine[1],[6]

Valeurs nutritionnelles de la graine de sarrasin crue – ©Ciqual

 La fraction protéique contenue dans le sarrasin est importante : 12,9 g de protéines pour 100 g de graines crues en moyenne[7]. En terme de qualité, le score chimique corrigé de la digestibilité des acides aminés (DIAAS) du sarrasin commun et de Tartarie serait plus élevé que celui du blé, du riz brun, riz blanc ou encore celui du millet[8].

Le blé noir comporte une forte teneur en lysine, un des acides aminés essentiels souvent limitant dans les céréales. Ainsi, le sarrasin représente une alternative judicieuse pour compléter le profil protéique de certains produits contenant des céréales ou des légumineuses.

En plus de fournir une quantité importante de protéines de bonne qualité, le blé noir est source de micronutriments. Le taux de cendres du sarrasin, indicateur de la teneur minérale, varie entre 2,3 et 2,6%, en comparaison avec le blé qui n’en contient que 1,6%[2]. La pseudo-céréale contient notamment des teneurs élevées en zinc, cuivre, manganèse, magnésium, potassium et phosphore, par rapport à d’autres céréales comme le riz blanc ou le blé. Il est néanmoins important de noter que les teneurs en ces différents composés varient selon la variété de sarrasin ainsi que l’environnement de culture (Voir tableau[9]).

Teneurs des composés suivant la variété de sarrasin – ©Giménez-Bastida, J. A. et al, (2015)

Composition nutritionnelle du sarrasin, dont teneurs en acides aminés – ©Martínez-Villaluenga, C., Peñas, E., & Hernández-Ledesma, B. (2020)

Bénéfices santé : Les antioxydants : les vitamines antioxydantes E et C ainsi que d’autres composés phénoliques et flavonoïdes contenus dans le sarrasin permettent de neutraliser les espèces réactives de l’oxygène. Quand ces dernières sont accumulées dans l’organisme, le stress oxydatif qu’elles engendrent peut accélérer le vieillissement cellulaire et contribuer au développement de nombreuses pathologies cardiaques ou neurodégénératives[10]. De plus, la fermentation par le biais des bactéries lactiques aurait un effet potentialisateur de l’action antioxydante du sarrasin[11].

Les effets sur la santé cardiovasculaire du blé noir ont été décrits dans des expériences in vitro et in vivo. La fraction antioxydante participerait à la réduction de l’hypertension artérielle[9]. Ce mécanisme impliquerait l’inhibition des enzymes responsables de la conversion de l’angiotensine I en angiotensine de type II – une molécule vasoconstrictrice qui augmente la pression artérielle[12].

Des effets sur la glycémie ont également été documentés. Grâce à sa composition en fibres alimentaires et en sucres composés (amylose, amylopectine), le sarrasin fait partie des céréales à faible indice glycémique (IG). D’ailleurs, de nombreuses études précliniques et cliniques ont abouti à une moindre production plasmatique de glucose et d’insuline postprandiale, suite à l’ingestion de produits à base de sarrasin (en comparaison avec du pain blanc par exemple)[9].

Études cliniques en lien avec les effets de la consommation de sarrasin sur la santé – ©Martínez-Villaluenga, C., Peñas, E., & Hernández-Ledesma, B. (2020)

Dans tous les cas, il s’agit à ce stade de premiers résultats scientifiques encourageants mais qui restent à être confirmés pour faire consensus et pouvoir passer le stade de faire l’objet d’une communication nutritionnelle réglementairement validée.

5 : Benchmark 

Le marché des produits à base de sarrasin bio est bien diversifié, avec des aliments simples comme des graines, farines, flocons de sarrasin issus de l’agriculture biologique, mais aussi d’autres produits comme des boissons, gâteaux, préparations pour porridge ou encore des pâtes alimentaires en tout genre.

 

Les crozets de sarrasin bio de Markal :

Spécialité savoyarde par excellence et fabriquée traditionnellement au blé, les crozets se déclinent en une version au sarrasin (à 20%), avec tous les ingrédients issus de l’agriculture biologique.

Crozets sarrasin – ©Markal

 

So sarrasin cooking de Sojade :

Avec du sarrasin 100% français, Sojade commercialise une crème de cuisson biologique au sarrasin qui peut être utilisée dans des recettes salées ou sucrées.

Aide culinaire So Sarrasin Cooking! – ©Sojade

 

Les biscuits sablés sucrés et salés de l’Atelier du Sarrasin :

Produits à partir d’une farine de sarrasin Bio, ces sablés se déclinent en différents goûts sucrés comme la noix de coco ou la cannelle, mais aussi en version salée comme les sablés à la tomme ou au poireau. Les biscuits sont sans œufs et sans gluten.

Gamme de biscuits salés et sucrés – ©Atelier Sarrasin

Les pétales de sarrasin bio de Lucien Georgelin :

La marque propose une nouvelle gamme de céréales bio produits et fabriqués en France. Sans huile de palme ou huile hydrogénée, les pétales de sarrasin sont « source de protéines ».

Pétales de sarrasin – ©Lucien Georgelin

Les chips de sarrasin des crêperies Colas :

Les fabricants ont décidé de créer une version biologique des chips de sarrasin. 100% de blé noir, les chips peuvent être consommés en apéritif, nature ou avec un accompagnement.

Chips de sarrasin – ©Crêperie Colas

 

Les rillettes de poulet rôti au sarrasin torréfié bio de Hénaff :

Ces rillettes bio contiennent des graines de sarrasin torréfiées issues de l’agriculture biologique.

Rillettes contenant des graines de sarrasin torréfiées – ©Hénaff

 

Le muesli croustillant Bio de KOKOJI :

Le mélange contient du sarrasin prégermé, des dattes, du citron et du gingembre tous issus de l’Agriculture Biologique. Une alternative intéressante, par rapport aux céréales de petit-déjeuner, souvent trop sucrées.

Muesli croustillant Yellow Detox – ©KOKOJI

 

Le chocolat noir au sarrasin torréfié de Grain de Sail:

Ce produit ne contient que des ingrédients issus de l’agriculture biologique, dont le sarrasin torréfié.

Tablette de chocolat noir raisins et sarrasin torréfié – ©Grain de sail

 

6 : L’offre bio 

Le sarrasin est disponible en bio sous différentes formes (farines, germés, fibres, graines, flocons…).

Où trouver du sarrasin bio ?

[1] Ahmed, A. et al, (2013). Phytochemicals and bio-functional properties of buckwheat: a review. The Journal of Agricultural Science, 152(03), 349–369.

[2] http://ephytia.inra.fr/fr/C/18052/Hypp-encyclopedie-en-protection-des-plantes-La-plante-et-ses-utilisations

[3] Kreft, I. et al, (2016). Bioactive Flavonoids in Buckwheat Grain and Green Parts. Molecular Breeding and Nutritional Aspects of Buckwheat, 161–167.

[4] http://www.fao.org/faostat/en/#data/QC

[5] Al-Snafi, A. L. et al, (2017). A review on Fagopyrum esculentum: A potential medicinal plant. IOSR Journal of Pharmacy. (e)-ISSN: 2250-3013, (p)-ISSN: 2319-4219 Volume 7, Issue 3 Version. 1. PP. 21-32.

[6] Rutine : Ce sont des pigments naturels appartenant à la famille des flavonols (flavonoïdes naturels). Le sarrasin est une source concentrée de rutine. Parmi ses bénéfices santé les plus étudiés, on peut citer la réduction de la fragilité et la perméabilité des capillaires sanguins.

[7] CIQUAL (ANSES) : Sarrasin : https://ciqual.anses.fr/#/aliments/9380/sarrasin-entier-cru

[8] Martínez-Villaluenga, C., Peñas, E., & Hernández-Ledesma, B. (2020). Pseudocereal grains: Nutritional value, health benefits and current applications for the development of gluten-free foods. Food and Chemical Toxicology, 111178.

[9] Giménez-Bastida, J. A. et al, (2015). Buckwheat as a Functional Food and Its Effects on Health. Journal of Agricultural and Food Chemistry, 63(36), 7896–7913.

[10] Gupta, N. et al, (2013). Free Radical scavenging activity of Fagopyrum esculentum Moench. Seed and seed protein concentrat esextracted by different procedures. IOSR, ISSN: 2319-2399. Volume 5, Issue 3, Page 13-18.

[11] Rollán, G. C., Gerez, C. L., & LeBlanc, J. G. (2019). Lactic Fermentation as a Strategy to Improve the Nutritional and Functional Values of Pseudocereals. Frontiers in Nutrition, 6.

[12] Chia-Ling, J. et al, (2012). Angiotensin I-converting enzyme inhibitory 920 peptides: Inhibition mode, bioavailability, and antihypertensive effects. Biomed. 2, 130- 921 136.

[13] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32011R1169&from=FR

[14] https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2015SA0257.pdf

[15] https://www.anses.fr/fr/system/files/ERCA2019SA0022.pdf

Mémo : la gelée royale

     Gelée royale bio brute en bouteille – ©Desislava Vasileva_123RF

Les produits de la ruche sont de deux types :  les produits que les abeilles récoltent (pollens, nectar, propolis) ou ceux qu’elles fabriquent (miel, gelée royale). Depuis des années, de nombreux bénéfices santé sont attribués à la gelée royale. Elle est le seul apport alimentaire qui différencie les ouvrières de la reine en termes de taille, de poids, de longévité et de fécondité. Un parallèle a donc été effectué entre les effets de la gelée royale sur la reine et ses effets sur l’Homme qui en consommerait. D’où une utilisation de celle-ci comme ingrédient dès les années 60, avec le développement de l’«apithérapie». Entre tradition et innovation, voici un éclairage au sujet des applications et caractéristiques principales de la gelée royale.

1 : Origine et description 

Origine : La gelée royale est sécrétée naturellement par les glandes hypopharyngiennes et mandibulaires des jeunes abeilles ouvrières de l’espèce Apis mellifera dans le but de nourrir les larves et la reine. Elle est généralement récoltée tous les 3 jours, de mai à juillet en France, lorsque les cellules royales ont atteint leur capacité maximale de stockage. La production de gelée royale nécessite un savoir-faire particulier[1].

Caractéristiques organoleptiques :

Apparence : La gelée royale est une substance gélatineuse, opaque, de couleur blanc nacré. Elle peut également présenter des cristaux, plus ou moins gros, de couleur jaune[2].

Odeur : elle a une légère odeur caractéristique de phénols

Goût : contrairement au miel, elle a un goût acide (pH 3-4).

Description : Le marché de la gelée royale est principalement divisé en deux types d’ingrédients :

  • Gelée royale fraîche
  • Extrait de gelée royale

Les conditions de stockage de la gelée royale pour son utilisation en alimentation humaine sont un point critique pour préserver ses propriétés. Cet ingrédient est en effet sensible à la chaleur et à l’oxydation[3]. ll est ainsi recommandé de la conserver fraîche au réfrigérateur, entre +2 et +5°C.

Aspect des cellules de gelée royale remplies – @Association GLAZ

Chiffres clés du marché : À l’échelle internationale, l’Asie-Pacifique (APAC) est le plus gros marché de consommation de gelée royale. Mais l’Amérique du Nord et l’Europe sont en pleine expansion[4]. Au cours des prochaines années, le marché de la gelée royale enregistrera un taux de croissance annuel moyen d’environ 3% pour atteindre 100 millions de dollars US d’ici à 2024. Au niveau européen, l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie et la France sont cités parmi les principaux pays qui jouent un rôle clé sur le marché.

La production de gelée royale en France a diminué de 4 % en 2018 pour atteindre 2903 kg (contre 3013 kg en 2017)[5]. Mais ces chiffres ne reflètent pas directement l’évolution de la production puisque cette dernière a globalement augmenté entre 2015 et 2018.

Quantités de gelées royales produites entre 2015 et 2018 – ©FranceAgriMer.

La part de la production en bio gagne également du terrain par rapport aux années précédentes. Près de 40% des productions de gelées royales étaient certifiées Agriculture Biologique en 2017, 43% l’année suivante. D’après le Groupement des Producteurs de Gelée Royale (GPGR), la proportion du volume de gelée royale produite en Agriculture Biologique par ses adhérents était de 67% en 2018.

Bien que la production soit en hausse en France depuis 2015, la gelée royale reste massivement importée. Chaque année, les français en consomment à peu près 175 tonnes, dont 170 tonnes importées principalement depuis la Chine et une grande majorité sous forme congelée (environ 110 tonnes).

2 : Réglementation 

Statut : Contrairement au miel, la gelée royale ne fait pas l’objet d’une réglementation spécifique. Un projet de normalisation international (ISO) a en revanche été lancé dès 2009 dans le but de définir les standards internationaux du produit.

Le texte de norme ISO 12824:2016 est désormais une référence pour définir les caractéristiques de la gelée royale en l’absence d’un autre texte réglementaire. Cette norme spécifie notamment les exigences de production, d’étiquetage et les règles sanitaires concernant cette substance et établit une série de méthodes d’analyses organoleptiques et chimiques pour contrôler sa qualité. A noter : Elle ne s’applique pas aux produits à base de gelée royale dans lesquels d’autres aliments sont mélangés.

La marque « Gelée Royale Française », propriété du Groupement des Producteurs de Gelée Royale (GPGR), identifie la gelée royale produite sur le territoire français et dans le respect de la charte de qualité établie par le groupement. Contrôlée par un organisme indépendant, cette démarche qualité garantit :

  • une gelée royale produite sans nourrissement artificiel en période de production, respectant l’alimentation naturelle de l’abeille (miel, pollen) ;
  • des pratiques apicoles respectueuses de la santé de l’abeille et de son environnement ;
  • un produit final conservé au froid, sans congélation, et dans son état originel : aucune transformation (lyophilisation – gelée royale en ampoule), aucun mélange (avec du miel, propolis, produit cosmétique, ginseng etc.)

Logo Gelée Royale Française

Allégation santé : Aucune allégation de santé n’est à ce jour autorisée en Europe que ce soit pour le miel, le pollen et la gelée royale (selon dispositions du règlement CE n°1924/2006).

Les cures de gelée royale contre la fatigue sont prescrites depuis des dizaines d’années, mais cet usage relève plus de la tradition que de la science. Aux vues des données scientifiques disponibles, les autorités de santé européennes (EFSA et la Commission européenne) ont estimé que les produits contenant de la gelée royale ne peuvent en effet prétendre à ce jour à aucune allégation de santé, que ce soit en lien avec le stress, l’immunité, la vitalité, l’inflammation ou le potentiel antioxydant.

A titre d’exemple, le dictionnaire Vidal 2003 indique que l’Apiserum® Fort, contenant de la gelée royale, est utilisé pour « améliorer les défenses de l’organisme lors de fatigues physiques et intellectuelles », or dans la version du dictionnaire Vidal 2015 les propriétés attribuées à celle-ci sont très évasives sans aucune allégation : « la gelée royale est un produit naturel très complet »[11].

Evolution du dictionnaire Vidal entre 2003 (à gauche) et 2015 (à droite) pour l’Apiserum® Fort

Du fait qu’il n’est à ce jour pas possible d’apposer une allégation de santé sur l’emballage des produits contenant uniquement de la gelée royale, les fabricants optent pour une stratégie marketing axée sur la naturalité et la proposition d’une solution ultra-doséeGelée royale la plus concentrée du marché »).

Forté Pharma Gelée royale bio en ampoules

Une autre option est également employée : proposer un produit contenant de la gelée royale couplée à d’autres ingrédients porteurs d’allégations de santé en attente d’évaluation pour un effet « Fortifiant et stimulant ». C’est l’option retenue par Arkopharma, par exemple :

– un extrait sec de ginseng pour une allégation « augmentation des performances physiques » ou « augmentation de la concentration » (allégations en attentes ID 2808 ou 2809)

– du jus d’acérola riche en Vitamine C qui contribue à réduire la fatigue.

Arko Royal® Dynergie par Arkopharma

3 : Intérêts fonctionnels de la gelée royale 

Domaines d’applications : Qu’elle soit produite en France ou importée de l’étranger, la gelée royale est utilisée par 3 secteurs ou marchés spécifiques[6] :

– en compléments alimentaires : environ 70 % des volumes disponibles, soit 120 tonnes. Les volumes disponibles en France étant insuffisants au regard de la demande industrielle et les prix étrangers étant nettement plus bas (environ 30 €/kg pour l’origine chinoise Bio contre 1200 €/kg pour la française), une large part de la gelée royale contenue au sein de compléments alimentaire provient ainsi de l’importation.

– en denrées alimentaires courantes : principalement des produits mixtes à base de miel et de gelée royale. Il s’agit du deuxième secteur qui utilise le plus cette substance avec plus de 24% des volumes disponibles (soit environ 40 tonnes d’origine française et importées confondues) et le premier marché à utiliser la gelée royale locale.

La Tonic Soupe de Légumes de Cap Bio aux Extraits de Plantes & Huiles Essentielles

– en cosmétique : Part plus marginale, avec une consommation d’à peu près 8% des volumes totaux utilisés (soit 15 tonnes de gelée royale). La gelée royale française est quant-à-elle très faiblement représentée dans le marché cosmétique, hygiène et bien-être, ce qui en fait un terrain potentiel de croissance pour la filière issue de ruches françaises.

4 : Intérêts nutritionnels et bénéfices santé connus

Composition nutritionnelle : Avant d’aborder la composition de la gelée royale, il est primordial de rappeler que celle-ci, d’origine naturelle, n’est pas standardisée. Elle dépend donc des conditions environnementales (saison, lieu de récolte, météorologie) mais également des abeilles, etc[7].

Principaux composants[8] :

  • de l’eau (entre 60 et 70 % du poids total) ;
  • des sucres simples (11-23 %, environ 30% de la matière sèche) : fructose, glucose et saccharose majoritairement ;
  • des protéines (9-18 %) ;
  • des lipides (4-8 %) ;
  • des vitamines (principalement du groupe B) et quelques sels minéraux (0,8-3% de micronutriments)

 

Composition moyenne de la Gelée Royale française (analyse produite par les membres du G.P.G.R. et réalisée par le laboratoire QSI en février 2014).

 Les protéines majeures de la gelée royale (MRJPs) également appelées apalbumines peuvent représenter jusqu’à 50% de la matière sèche. Il s’agit d’un des principaux composants bioactifs considérés comme un facteur majeur dans le développement des reines.

Des allégations nutritionnelles possibles ? :

A noter, la consommation journalière de gelée royale n’excède généralement pas 2 grammes (aux vues des formes de compléments alimentaires les plus concentrées) ce qui ne permet pas d’atteindre le seuil de présence significative (15% des Valeurs Nutritionnelles de Référence ou VNR par portion) pour la plupart des nutriments qui la composent et par conséquent n’autorise pas l’apposition d’allégations nutritionnelles de type « Source de Vitamine B1 » par exemple.

Effets sur la santé : Les potentiels effets santé de la gelée royale ont fait l’objet de nombreuses publications et revues scientifiques  : activité antioxydante, antibactérienne, antitumorale, anti-inflammatoire, modulation de l’immunité, etc.[9]. Néanmoins, ses mécanismes d’action sur les activités physiologiques susmentionnées n’ont pas été entièrement élucidés.

D’après la littérature disponible, certains composants d’intérêts présents dans la gelée royale tels que la royalisine, les jelleines et l’acide 10-hydroxy-2-décénoïque (10-HDA), ont montré une activité élevée contre les bactéries à Gram positif tandis que leur efficacité diminue contre les Gram négatif. De plus, plusieurs études suggèrent une efficacité contre des bactéries multirésistantes (exemple de Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline). L’extraction/purification de certains composants actifs représente donc une piste intéressante pour la formulation de nouveaux produits à visée nutraceutique et en tant qu’alternatives potentielles aux antibiotiques conventionnels. Des recherches supplémentaires sont néanmoins nécessaires pour expliquer leurs contributions aux bénéfices santé potentiels[10].

 5 : L’offre en gelée royale bio 

Tout comme le miel et les autres produits de la ruche, la gelée royale est disponible en bio, sous forme fraîche, congelée/décongelée ou lyophilisée. Retrouvez l’offre de gelée royale bio grâce à l’Annuaire Ingrébio.

6 : Perspective

 Bien que la production de gelée royale soit en hausse en France, notamment en Bio, elle reste minime par rapport à la consommation et aux produits importés, essentiellement de Chine. L’évolution des attentes des consommateurs, notamment en demande de produits issus des circuits-courts favorise l’utilisation de gelée royale française par les fabricants de compléments alimentaires à base de produits de la ruche.

Au-delà de ses garanties de qualité et d’origine, la gelée royale bénéficie d’une image santé positive reposant sur un usage traditionnel. D’un point de vue scientifique, de nombreuses propriétés prometteuses de la gelée royale et plus spécifiquement de certains de ses composés restent cependant à explorer[12].

[1] Données Observatoire de miel et gelée royale FranceAgriMer, Bilan de campagne miel 2018

[2] Site Label GRF

[3] Fratini et al. Royal Jelly : An ancient remedy with remarkable antibacterial properties. Microbiological Research. Microbiol Res. 2016 Nov;192:130-141. doi: 10.1016/j.micres.2016.06.007.

[4] Royal Jelly (aka Honey Bee Milk, Bee Saliva, Royal Bee Jelly) Market » 2020-2024 Report, LP Information INC. Etude du marché mondial de la gelée royale qui fournit des prévisions sur 5 ans (2019-2024).

[5] Données Observatoire de miel et gelée royale FranceAgriMer, Bilan de campagne miel 2018

[6] FranceAgrimer. Mai 2016. Synthèse sur le marché de la gelée royale. https://www.franceagrimer.fr/content/download/44768/document/SYN-MIEL-Etude%20march%C3%A9%20gel%C3%A9e%20royale%202015.pdf

[7] Thèse Marie Babin, 2014-2015. La gelée royale, de son origine à sa valorisation pharmaceutique. UFR Sciences pharmaceutiques et ingénierie de la santé. Université d’Angers.

[8] Fratini et al. Royal Jelly : An ancient remedy with remarkable antibacterial properties. Microbiological Research. Microbiol Res. 2016 Nov;192:130-141.

[9] Pasupuleti et al. Honey, Propolis, and Royal Jelly: A comprehensive Review of their Biological Actions and Health Benefits. Oxid Med Cell Longev. 2017;2017:1259510.

Fratini et al. Royal Jelly : An ancient remedy with remarkable antibacterial properties. Microbiological Research. Microbiol Res. 2016 Nov;192:130-141. Ramanathan et al. A review on Royal Jelly proteins and peptides. Journal of Functional Foods. 2018; 44:255-264.

[10] Pasupuleti et al. Honey, Propolis, and Royal Jelly: A comprehensive Review of their Biological Actions and Health Benefits. Oxid Med Cell Longev. 2017;2017:1259510.

[11] Thèse Marie Babin, 2014-2015. La gelée royale, de son origine à sa valorisation pharmaceutique. UFR Sciences pharmaceutiques et ingénierie de la santé. Université d’Angers.

[12] Fratini et al. Royal Jelly : An ancient remedy with remarkable antibacterial properties. Microbiological Research. Microbiol Res. 2016 Nov;192:130-141.

FODMAPs et santé : de nouvelles données sur leur consommation et l'impact des procédés

Légumineuses germées – ©anaumenko 123RF

Le terme de FODMAP regroupe plusieurs types de glucides fermentescibles qui font l’objet d’une attention croissante de la part des scientifiques et industriels ces dernières années. Ces FODMAPs sont en effet associés à la survenue de symptômes digestifs, notamment dans le cadre du syndrome de l’intestin irritable. Quelles sont les avancées récentes depuis notre éclairage scientifique publié en juin 2019 ? Certains procédés tels que la germination ou la fermentation peuvent-ils contribuer à réduire les teneurs en FODMAPs des aliments ?

RAPPELS SUR LES FODMAPS & LE RÉGIME PAUVRE EN FODMAPS

FODMAP est l’acronyme anglo-saxon pour Fermentable Oligosaccharides, Disaccharides, Monosaccharides And Polyols. Peu ou pas absorbés au niveau intestinal, les FODMAPs sont métabolisés par les bactéries du côlon, engendrant une production de gaz associés à des symptômes allant de l’inconfort digestif à des douleurs ou diarrhées impactant significativement la qualité de vie des individus touchés.

QUEL IMPACT DES FODMAPS CHEZ DES SUJETS SAINS OU DES SUJETS COLOPATHES, C’EST-À-DIRE DES PATIENTS DIAGNOSTIQUÉS POUR UN SYNDROME DE L’INTESTIN IRRITABLE (SII) ?

La prévalence reconnue du SII est d’environ 5–10% au sein de la population générale. D’après de récentes études cliniques, un régime pauvre en FODMAPs serait efficace à court terme pour améliorer les principaux symptômes tels que les douleurs et ballonnements, chez environ 2/3 des colopathes. Les modalités de mise en œuvre de ces études cliniques sont toutefois critiquables du fait d’effectifs réduits, de résultats évalués à court-terme et de difficultés à mener des études en double aveugle. En pratique, la prescription d’un régime sans FODMAPs représente une aide initiale importante chez des patients très ballonnés. Mais de nouvelles données semblent indiquer que l’efficacité du régime sans FODMAPs vs un régime d’épargne classique serait à nuancer. De plus, la suppression des principaux aliments contenant des FODMAPs réduirait l’apport en prébiotiques et probablement simultanément en fibres alimentaires, ce qui contribuerait à un appauvrissement du microbiote intestinal [1],[2].

Le régime pauvre en FODMAPs peut donc être indiqué en première intention mais dans tous les cas, doit être transitoire et avec l’accompagnement d’une diététicienne qui préconisera leur réintroduction progressive pour ne pas restreindre l’apport alimentaire en fibres à effets prébiotiques (A l’instar de l’accompagnement personnalisé proposé par Happybiote par exemple).

DES DONNÉES RÉCENTES ESTIMANT LA CONSOMMATION DE FODMAPS EN POPULATION GÉNÉRALE

Les FODMAPs sont omniprésents dans notre alimentation, résultant de la consommation de fruits et légumes, légumineuses, céréales, oléagineux, produits laitiers mais également de sauces, produits sucrés, boissons alcoolisées, édulcorants et aliments ultra-transformés. En revanche, la quantité de FODMAPs consommée dans la population générale est peu décrite car leurs apports sont généralement évalués chez des patients en milieu hospitalier. Bonne nouvelle, une étude visant à décrire la consommation de FODMAPs dans un large échantillon de la population française vient d’être publiée[3] !

D’après ces résultats issus de la cohorte Nutrinet-Santé (+ de 100 000 volontaires, 78% de femmes, âge moyen de 44 ans), la consommation moyenne de FODMAPs en France est estimée à 19 g par jour. Près de 12% des participants auraient des apports inférieurs à 9 g/jour soit l’équivalent de régimes pauvres en FODMAPs. L’apport le plus élevé de FODMAPs était représenté par le lactose suivi du fructose (en excès de glucose), des fructanes, polyols et galacto-oligosides (GOS). En comparaison à d’autres études menées chez des individus sains en Espagne ou en Suède[4],[5], ces données soulignent une consommation française plus faible ou équivalente en FODMAPs totaux (21,4 g/jour en Espagne, 19,4 g en Suède) et des apports inférieurs en lactose (16,6 g en Espagne, 14 g en Suède vs. 10,3g en France), variations s’expliquant probablement par des différences de modèles alimentaires. En Suède, les aliments contenant des FODMAPs les plus couramment consommés étaient à base de seigle et de blé. En Espagne, un « Top 10 » des principales sources de lactose, fructose (en excès de glucose) et fructanes a également été proposé. Les principales sources alimentaires de FODMAPs n’ont pas été analysées dans l’étude française.

Tableau : Top 10 des aliments représentant les principales sources d’apports en lactose, fructose et fructanes dans la population adulte espagnole (Extrait de la publication de Miranda et al.)

IMPACT DES PROCÉDÉS SUR LA TENEUR EN FODMAPS

FERMENTATION – FOCUS SUR LE LACTOSE

Dans le cas des yaourts et de tout autre type de lait fermenté, les bactéries lactiques présentes digèrent le lactose au niveau intestinal. L’action bénéfique des bêta-galactosidases pour améliorer la digestion du lactose chez les individus ayant des difficultés à le digérer est bien documentée et soutenue par une allégation de santé autorisée en Europe[6] : « Les cultures vivantes des yaourts ou des laits fermentés améliorent la digestion du lactose de ces produits chez les individus ayant des difficultés à le digérer » Pour utiliser cette allégation, les yaourts ou laits fermentés doivent contenir au moins 108 unités formant colonies des 2 types de ferments (Lactobacillus delbrueckii subsp. bulgaricus et Streptococcus thermophilus) par gramme.

Pour cette raison, bien qu’il contienne 2 à 4 g de lactose pour 100 g, un yaourt est généralement bien toléré par les personnes présentant une activité de la lactase réduite.

Dans le cas de la fabrication des fromages, le procédé de fermentation lactique permet d’éliminer la majorité du lactose au moment de l’égouttage. La faible quantité de lactose restante est ensuite pré digérée pendant l’affinage par les bactéries lactiques. C’est pourquoi la plupart des fromages affinés ne présentent que des traces de lactose.

De manière plus globale, la fermentation induit des changements en termes de concentration/nature en nutriments ou via un effet de l’activité des microorganismes présents qui pourraient aller dans le sens d’une meilleure digestibilité[7] des sucres, en réduisant notamment les teneurs ou les effets indésirables de certains FODMAPs. Cet axe de valorisation est investi par la start-up Greenspot qui mise sur l’utilisation du processus naturel de fermentation pour développer des farines fermentées à base de coproduits de fruits et légumes contenant une faible quantité de sucres.

L’impact positif souvent évoqué des produits fermentés sur la physiologie et les pathologies spécifiques de l’intestin pourrait donc s’expliquer en partie par la réduction des FODMAPs mais également par bien d’autres effets directs ou indirects liés aux micro-organismes qui restent à explorer. Un sujet qui sera sans doute investi dans le cadre de la nouvelle action européenne COST PIMENTO[8] qui vise à fédérer les acteurs scientifiques et socio-économiques travaillant sur les aliments fermentés pour promouvoir l’innovation en matière d’aliments fermentés.

AUTRES PISTES EN LIEN AVEC LA GERMINATION OU L’UTILISATION D’ENZYMES

Autre exemple de démarche innovante présentée lors du FIE 2020, la société Sprau basée en Finlande utilise la germination pour booster le profil nutritionnel des féveroles tout en revendiquant l’intérêt de ce procédé pour réduire les teneurs en galacto-oligosides (GOS)[9].

Après deux jours de germination, une quantité négligeable de GOS serait présente dans leurs ingrédients (Figure ci-dessous). Les GOS étant résistants aux traitements thermiques, la germination semble avoir un meilleur potentiel que d’autres procédés tels que l’extrusion pour réduire les teneurs en GOS et simultanément les facteurs anti-nutritionnels d’ingrédients à base de légumineuses[10].

Figure : Évolution des teneurs en GOS et saccharose au cours du procédé de germination appliqué à des féveroles (Extrait du livre blanc “Germination – a natural way to awaken the bean to its full potential”, Sprau™)

Les analyses de GOS dans les féveroles ont été menées en partenariat avec le VTT Technical Research Centre, dont les travaux avaient précédemment fait l’objet d’une revue signée par Nyyssölä et al. sur la réduction des FODMAPs par les bioprocédés[11] : fermentation, germination et utilisation d’enzymes. Le contenu en FODMAPs de différents types de produits laitiers, céréaliers ou de légumineuses peut être réduit significativement par ces procédés. Les traitements enzymatiques sont présentés comme plus spécifiques et simples à contrôler que l’action de ferments ou la germination, ces derniers induisant des changements plus complexes à évaluer d’un point de vue nutritionnel et sensoriel.

Parmi les exemples d’enzymes visant à faciliter la digestion de FODMAPs, l’utilisation de lactase est une des solutions proposées pour les intolérants au lactose (Exemple du produit Digelact 4500 Bio). « La lactase améliore la digestion du lactose chez les individus ayant des difficultés à le digérer » est une allégation de santé autorisée en Europe conformément au règlement (UE) n°432/2012. L’allégation ne peut être utilisée que pour des compléments alimentaires, à une dose minimale de 4 500 unités FCC (Food Chemicals Codex), la population cible devant être invitée à en consommer avec chaque produit contenant du lactose.

Digelact – Alphanova

Plus récemment, de nouveaux résultats ont été publiés par l’équipe du VTT précédemment citée, sur l’utilisation de galactosidases commercialisées par Bio-Cat (USA) et Amano (Japon) sur le contenu en GOS de différents ingrédients à base de pois jaune ou féveroles ou produits à base de ces ingrédients (Ex : crackers)[12]. Ils montrent l’effet fort de ces galactosidases sur la réduction de la teneur en GOS dans les produits humides, mais aussi l’effet inverse du procédé d’extrusion…

EN CONCLUSION

Les effets indésirables des FODMAPs d’un point de vue digestif représentent un frein à la consommation de nombreux aliments recommandés dans un objectif de prévention nutritionnelle des maladies chroniques : Fruits et légumes, produits céréaliers complets, légumineuses, etc. La réduction des FODMAPs via certains procédés tels que la germination, la fermentation ou l’utilisation d’enzymes alimentaires représente donc un enjeu important car elle contribue à faciliter la transition nutritionnelle en faveur de plus de végétal en améliorant la tolérance digestive des aliments à teneur élevée en FODMAPs. Mais cet objectif de réduction des FODMAPs doit être évalué avec prudence. La qualité nutritionnelle globale, et en particulier la teneur en fibres alimentaires et prébiotiques, sont en effet des points importants à considérer lorsque la teneur en FODMAPs des aliments est réduite. La valorisation marketing de ces aliments pose également question. Du fait d’un manque de données scientifiques établissant un réel lien de cause à effet entre FODMAPs et santé, la réglementation relative aux allégations nutritionnelles et de santé n’offre que de rares opportunités de valorisation à l’exception des ferments du yaourt ou de la lactase. L’utilisation de procédés et traitements enzymatiques visant à réduire les différents types de FODMAPs doit donc faire l’objet de recherches approfondies, au cas par cas, pour permettre de développer de nouveaux aliments globalement optimisés d’un point de vue nutritionnel, sensoriel et environnemental.

Pour aller plus loin : l’utilisation d’enzymes en bio

[1] Huaman et al. Gastroenterology, 2018 https://doi.org/10.1053/j.gastro.2018.06.045

[2] Starz et al. Nutrients, 2021 doi: 10.3390/nu13072125

[3] Schneider et al. The Journal of Nutrition, 2021 https://doi.org/10.1093/jn/nxab207

[4] Miranda et al. Int J Environ Res Public Health 2020 Aug 13;17(16):5882. https://doi.org/10.3390/ijerph17165882

[5] Lilijebo et al. BMC Nutr. 2020; 6: 47. doi: 10.1186/s40795-020-00374-3

[6] Source :  Règlement (UE) n°432/2012

[7] Kortal et al. Cahiers de Nutrition et de Diététique, 2020 https://doi.org/10.1016/j.cnd.2020.02.004

[8] Projet européen démarrant en novembre 2021 : Promoting Innovation of ferMENTed fOods

[9] v. Sprau la fève germée en lice pour les FIE Awards 2020, Ingrébio, 24/11/2020

[10] Pasqualone et al. Foods 2020 https://doi.org/10.3390/foods9070958

[11] Nyyssölä et al. Trends in Food Science & Technology 2020 https://doi.org/10.1016/j.tifs.2020.03.004

[12]Nyyssölä et al. Future Foods 2021 https://doi.org/10.1016/j.fufo.2021.100047